Les derniers chiffres de 2012 sont parus : 56 337 homicides par an au Brésil.
Désespérant… d’autant plus que ce chiffre est en constante hausse, et est le plus élevé depuis 1980 [il a augmenté de 7% par rapport à 2011, sachant que les chiffres de 2011 étaient eux-mêmes de 7% plus élevés qu’en 2010]. L’étude, écrite sous la direction du sociologue Júlio Jacobo Waiselfisz, est disponible dans son intégralité ici, en portugais : Mapa da violência.
Depuis l’année 2000, ce sont ainsi 600 000 brésiliens qui ont perdu la vie – une hécatombe, qui dépasse certaines guerres régionales ou conflits armés. En chiffres absolus, c’est plus que les morts liés à la guerre des cartels au Mexique, que la guerre civile larvée en Colombie, que la violence en Amérique centrale, dans la bande de Gaza…
Cependant, ce chiffre effarant est passé sous silence car les analystes rapportent le nombre de victimes à sa population. Si l’on rapporte les 56 337 meurtres à une population brésilienne de presque 200 millions d’habitants, cela fait un taux de 29 homicides pour 100 000 habitants – un chiffre inférieur à de nombreux pays d’Amérique centrale par exemple. Mais en chiffres absolus, le Brésil remporte ce triste classement…
Quelles sont les raisons de cette violence ? Trafic de drogues, crime organisé ? Eh bien non – il s’agit pour l’essentiel de bagarres de voisinage, de famille, liées à l’alcool… Les victimes sont surtout des jeunes Noirs ou métis. La mort violente est devenue la principale cause de décès des jeunes hommes de moins de 19 ans.
Cependant, comme le signale P. Paranagua dans son blog, « Des États qui ont bénéficié des programmes sociaux, comme l’Alagoas, le Pará, la Paraíba et Bahia, ont connu une hausse des meurtres. La lutte contre la pauvreté ne suffit donc pas à enrayer cette épidémie. (…) Le phénomène s’étend partout, avec une progression plus accentuée dans les municipalités moyennes ou petites, qui compense l’amélioration dans les grandes villes comme à Rio de Janeiro ou São Paulo. » En effet, dans les grandes villes le taux d’homicide a baissé de 20,9% … mais il a augmenté de 23,6% dans les petites villes.
Ce chiffre est surtout la démonstration de l’échec des politiques publiques de sécurité, incapables de réformer le système carcéral, la police, etc. Résultat : ce problème national n’est traité qu’à l’échelle locale, par la Police militaire et la Police civile – deux institutions minées par la corruption, l’impunité et l’incompétence. La seule police digne de ce nom – la Police fédérale – ne possède pas de mandat pour s’occuper de ces meurtres.
Voir sur le sujet de la violence au Brésil les articles de Je suis toujours favela (2014):
Les Noirs au Brésil en 2014, sur la surreprésentation des Noirs dans le taux d’homicides
Voir sur le sujet de la violence au Brésil les nombreux articles de Je suis favela (2011):
Police mortifère, sur la corruption de la police \Du ciel à l’enfer, sur la réponse de la police contre le crime
L’État brésilien continue à tuer beaucoup trop, entretien avec une juge, défenseure des droits de l’Homme.