Quelques vidéos, articles pour en savoir plus sur ce thème, vaste et sujet à de multiples interprétations. Il s’agit juste de quelques pistes… A vous d’aller plus loin !
Qu’est-ce que le décolonialisme ? Il s’agit « d’une pensée critique qui dénonce l’hégémonie politique et culturelle de l’Occident, gommant non seulement la participation de toute autre civilisation ou culture à la construction de la science moderne, mais excluant de plus tout autre forme de savoir dans la construction historique du monde d’aujourd’hui. » Les autres savoirs (autochtones, afrodescendants, etc.) ont été exclus de l’épistémologie dominante. Il suffit pour cela de regarder sa bibliothèque, de se rappeler ses cours de lycée, d’université ! Combien d’auteurs et d’intellectuels non-Occidentaux avons-nous étudiés ? Avec le décolonialisme, nous cherchons donc à « dissoudre la colonialité dans toutes ses formes (colonialité du pouvoir, du savoir, de l’être, du genre et de la nature » (citations : Lissell Quiroz). Enfin, pour reprendre Françoise Vergès, “une politique décoloniale questionne une République où s’accumulent inégalités, discriminations et politiques d’abandon“. (dans Le ventre des femmes).
Féminisme, décolonialisme et antiracisme
Le féminisme noir, intersectionnel, décolonial… Un féminisme différent du féminisme dit universel – qui, au final, exclut une grande partie des femmes.
Une compilation de féministes décoloniales
Lélia Gonzalez, le féminisme noir
Maria Lugones, Colonialité et genre
Deux vidéos, deux podcasts
La décolonisation de l’histoire
La décolonisation de l’histoire
Lissel Quiroz (docteure en histoire et maîtresse de conférences en études latino-américaines à l’université Rouen Normandie) critique le regard eurocentré dans son article “Les colonisé·es peuvent-ils parler ?”. Elle parle également d’une série diffusée par Arte sur le thème de la Décolonisation qui a été beaucoup critiquée pour sa perspective : “Dans les différentes interviews données à la presse, les auteurs insistent sur leur volonté d’adopter le point de vue des colonisés. Cependant, comme le souligne Gayatri Spivak, bien que cette approche historique soit pertinente et justifiée, elle peut aboutir aussi à parler, à s’exprimer à la place des Subalternes, au lieu de faire entendre leurs voix. C’est le travers dans lequel tombe ce documentaire” (…). Selon Angeline Benoît, dénoncer les crimes coloniaux ne suffit pas à sortir du récit dominant. “Derrière le foisonnement d’anecdotes et d’archives, les habituels silences: les mots suprématie blanche, mondialisation, génocide, épistémicide, racisme ou encore discriminations sont absents ou presque. ” (article ici)
Lorsque j’ai écrit mon livre 1492 Anacaona, l’insurgée des Caraïbes, j’ai justement cherché à décoloniser le récit qui est fait de la Découverte de l’Amérique (et des Caraïbes). Ecoutez la petite vidéo où j’explique un peu plus les raisons qui m’ont poussée à écrire ce livre.
Cette expérience m’a semblé si importante (et si plaisante 😉) que je l’ai renouvelée, avec l’histoire de Solitude la flamboyante, figure légendaire du mouvement de résistance anti-esclavage guadeloupéen. Je vous propose une petite vidéo où je parle du processus d’écriture et de l’histoire de cette femme si inspirante. Vous pouvez également lire l’article d’une étudiante, Mathilde Begu, qui fait le lien entre mon livre et le livre de Françoise Vergès, Un féminisme décolonial.
Enfin, une vidéo (pensez à activer les sous-titres !) de Jarid Arraes, qui présente une héroïne méconnue de la lutte contre l’esclavage : Dandara.
Je vous recommande également un article très intéressant, où Alain Brossat s’exprime sur la question postcoloniale, qu’il faut songer à prendre en compte dans l’analyse et le commentaire des rapports sociaux actuels : Lire ici.
La décolonisation de la beauté
Cela vous paraît un thème anodin ? Mais la beauté aussi véhicule une vision dominante du monde. L’UNESCO considère d’ailleurs le défrisage du cheveux crépu comme une conséquence traumatique de la Traite transatlantique.
La reconquête de son auto-image est une forme d’empowerment. Comme le dit Joice Berth, “En réussissant à éradiquer en nous la stratégie raciste de dépersonnalisation et d’aliénation de l’image noire, nous nous renforçons et pouvons nous diriger progressivement vers l’acceptation de notre auto- image, puis ultérieurement son admiration. Car comment pouvons-nous réagir aux agressions du monde extérieur si, en voyant notre reflet dans le miroir, le seul sentiment qui nous accable est celui d’inadéquation et de répulsion envers l’apparence qui caractérise notre identité ? Qu’est-ce qui nous motiverait à lutter pour l’émancipation et l’équité raciale et de genre si nous portons un sentiment constant de distorsion et de non-appartenance, façonné par une esthétique sans beauté et donc sans qualités humaines louables ?” (puisque, n’oublions pas, tout ce qui est beau est considéré comme bon.) Tout un chapitre du livre de Joice Berth sur l’empowerment porte précisément sur l’esthétique.
Voici également deux vidéos de Juliette Smeralda, sociologue martiniquaise, autrice de Peau noire, cheveu crépu : l’histoire d’une aliénation (éditions Jasor). Elle se demande si la domination des Blancs s’est arrêtée avec la décolonisation et si oui, alors pourquoi tant de femmes noires cherchent-elles à blanchir leur peau ou à défriser leurs cheveux ? Passionnant.
Il y a des opposants à la pensée décoloniale...
Néanmoins, la pensée décoloniale fait grincer certaines dents. Ainsi, dans une tribune publiée en septembre 2019 dans le journal Le Monde, 80 intellectuels s’insurgeaient : « La pensée “décoloniale” renforce le narcissisme des petites différences », selon eux. “La pensée dite « décoloniale » s’insinue à l’université. Elle menace les sciences humaines et sociales sans épargner la psychanalyse. Ce phénomène se répand de manière inquiétante. Nous n’hésitons pas à parler d’un phénomène d’emprise, qui distille subrepticement une idéologie aux relents totalitaire en utilisant des techniques de propagande”. Plus récemment, on a qualifié les études postcoloniales “d’islamo-gauchisme”, de wokisme… ah ah ah! 😂
De quoi ont-ils peur ? De perdre leur place, leur privilèges, leur universalisme ? Pour reprendre Djamila Ribeiro, “lorsqu’ils parlent d’universel, nous savons très bien qu’ils ne parlent que d’eux-mêmes…”