Description
Résumé
Dans un coin perdu du sertão du Brésil, deux frères, Abel et Judas, que tout oppose, aiment la même femme. Isolés dans leur ferme, le conflit s’installe. Les duels sont épiques et silencieux, les passions primitives, les références bibliques. L’ombre du Destin poursuit les personnages.
Judas venait d’apparaître dans l’entrebâillement de la porte. Le voir fut un choc : tête découverte, torse nu, le pantalon lacéré à hauteur de la cuisse, inondé de sueur…
Raimundo Carrero mêle les univers chrétiens et païens, le profane et le sacré. Porté par son imaginaire poétique, il utilise le langage mystérieux de la cartomancie, la symbolique du Destin – tout en décrivant également une réalité bien prosaïque, celle d’une société patriarcale médiévale, où les hommes règlent leurs conflits par la violence et où les femmes n’ont pas leur mot à dire. Pour cet auteur, l’homme est toujours le même, coupable et innocent, prisonnier de la continuité cyclique de l’existence, seul.
Le roman Ombre sévère est emblématique du mouvement Armorial du Nordeste, ce courant littéraire brésilien des années 1970 qui adopte un certain réalisme dans les situations et les dialogues, et l’accompagne d’une magie et d’un mysticisme romanesques (Ariano Suassuna en est l’auteur le plus célèbre).
Comme de coutume pour les romans de la collection Terra, Ombre sévère est illustré de plusieurs reproductions de gravures sur bois (xilogravuras) de l’artiste Fernando Vilela, pour se plonger dans cette ambiance magique… Découvrir son travail ici.
À la fin, un dossier sur l’auteur et le contexte de l’époque. C’est le deuxième roman de Raimundo Carrero publié en France, après Bernarda Soledade, Tigresse du sertão.
Hélène B –
Ombre sévère est sombre, bien sûr, avec quelques magnifiques passages autour de cette jeune femme, Sarah. La fin, ouverte, m’a un peu déstabilisée mais c’est une très belle lecture, que je recommande vivement !
Croquignolle (Babelio) –
Je referme ce petit roman avec l’impression d’avoir été longtemps absente de chez moi. Je rentre d’un voyage formidable mais angoissant, totalement dépaysant mais lourd de secrets. Je prends une bonne respiration. Ouf, je suis maintenant en sécurité, loin de ce huis-clos du Nordeste, qui m’a à plusieurs reprises coupé le souffle.
C’est le premier roman de Raimundo Carrero que je lis et c’est une magnifique découverte. Son écriture est belle, poétique, rugueuse, directe, lumineuse, violente et exigeante. Elle ne laisse pas de répit et sollicite sans cesse nos sens et notre esprit.
Je ne connais pas le Brésil mais grâce aux mots de Carrero, j’ai pu appréhender les esprits de la forêt de ce coin de terre, sentir la chaleur étouffante d’un soleil au zénith et imaginer cette fazenda retirée du monde qui abrite des personnages étranges et fascinants : les deux frères Judas et Abel, bientôt rejoints par Dina.
Les personnages, leur caractère et les évènements qui leur arrivent trouvent tous leur origine dans la Bible. Rien de tel pour passionner la prof d’Ethique et Cultures religieuses que je suis ! C’est grisant de pouvoir faire des liens immédiats avec les histoires connues, même si l’auteur s’amuse parfois, avec les prénoms, à brouiller les pistes.
Ce roman peut être une vraie découverte théologique !
L’auteur a une magnifique capacité à varier le rythme et les ambiances. La mise en parallèle de la vie de Dina et de sa mère Sara est particulièrement réussie. Et on comprend ainsi aisément que dans ce coin de pays les chiens ne font pas des chats.
Je pourrais encore parler de l’emprise des traditions familiales sur les actions de chaque personnage, de l’amour-haine qui unit deux frères amoureux d’une même femme, de l’attachement intouchable des hommes du Nordeste à la terre de leurs ancêtres ou encore des secrets lourds des actes difficilement assumés… mais je vous laisse les découvrir sous la plume bien plus pertinente et belle de Raimundo Carrero.
Je termine en relevant encore les magnifiques illustrations de Fernando Vilela nous permettant de goûter plus en profondeur à la richesse de cette culture et de ce mouvement Armorial.
Jean Dubus –
“Ombre sévère” est un drame latin écrit par un Garcia Lorca brésilien qui chante le thème de l’amour, de la jalousie et de la mort. Deux frères aiment la même femme. Un frère trahit l’autre et le tue pour épouser la belle. Cela se passe évidemment dans le sertão au Nordeste du pays, terres de grande misère et de confusion morale induite par l’obscurantisme religieux.
« Ombre sévère » donne donc une image noble d’une civilisation méprisée, essentiellement constituée de paysans esclaves des grandes fazendas.
Le livre est beau et les illustrations sont exceptionnelles.
Lilicrapota (Babelio) –
Alors, d’abord l’objet-livre : super agréable, tout me plait : le grain du papier, le format, la police d’écriture, et la particularité osée des illustrations, qui ne laissent pas indifférent.
Ensuite, le roman en lui-même : eh bien je suis toujours incapable de savoir si ça m’a plu ou non !!!! Ca ne m’a pas laissée indifférente en tout cas, tout y est tellement étrange et éloigné de ce que j’ai l’habitude de lire… L’histoire est très noire, très sombre et écrite sans chichi, sans gant, avec une telle simplicité, un tel naturel que c’en est choquant, c’était sans doute le but recherché. Le décor, les habitudes de vie de ce Nordeste brésilien totalement inconnu de la lectrice auvergnate que je suis ajoutent à cette sensation d’étrangeté. (…)
Mais le huis clos entre ces 3, puis deux personnages et la tension qui monte, sans qu’on comprenne bien ce qui se passe dans leur tête, met mal à l’aise et en même temps (voyeurisme ?) on ne peut pas s’empêcher de poursuivre.
Ce que je retiendrai de ce livre est sans doute ce sentiment-là, cette sensation d’étrangeté, de “jamais vu”. Vraiment intéressant, c’est une très belle découverte !