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Une nouvelle génération d’intellectuels Noirs au Brésil

La génération d’intellectuels noirs que les politiques d’action affirmative (ou discrimination positive) ont aidées à former

Traduction libre d’un article d’Helena Borges, du journal O Globo

Une nouvelle génération d’intellectuels noirs, qui présente différentes productions universitaires et culturelles, sera au centre des débats dans des événements culturels à Rio de Janeiro ce mois-ci.

Ana Paula Lisboa fut la première de sa famille à être admise à l’université. Elle s’est inscrite sans le dire à ses parents, et les a informés seulement lorsqu’elle a eu le résultat.

Ils pensaient que j’allais m’arrêter au lycée. Quand j’ai dit que j’avais eu une bourse pour l’université, ils étaient tellement heureux !

Lorsqu’elle habitait à Engenho Novo [quartier populaire Nord de Rio de Janeiro], et qu’elle avait dit à sa grand-mère qu’elle voulait être écrivain, celle-ci lui avait répondu de trouver plutôt un emploi fixe. C’est pour cela qu’elle a choisi le journalisme. Aujourd’hui, elle est heureuse d’affirmer que 70% de ses revenus viennent de son travail d’écrivaine.

Ana Paula Lisboa, auteure présente dans Je suis encore favela et Je suis Rio

(…)

Mettant à mal le discours selon lequel ces politiques pourraient faire baisser le niveau universitaire, une étude publiée en 2017 par l’Unicamp a montré que les élèves bénéficiaires de ces politiques affichent des résultats équivalents aux autres. Selon la professeure Fatima Lima :

Les politiques d’action affirmative ont mis sous tension les relations de savoir lorsque ces étudiants sont arrivés avec une volonté, une pensée critique affûtée, une connexion avec le monde et les réseaux sociaux, et ont ainsi stimulé les professeurs à réviser leurs plans de cours.

Une de ses élèves par exemple, Luana Arah, est également auteure. Elle est un exemple de ces étudiants qui questionnent les bibliographies euro-centrées et qui cherchent à apporter des nouveaux thèmes et de nouveaux auteurs au sein de l’université. Luana rappelle que pendant sa licence, sur les 25 élèves de sa classe, elles n’étaient que trois Noires. Désormais étudiante en maîtrise de relations ethno-raciales, la réalité est bien différente, mais il y a encore des difficultés parmi les professeurs.

(…)

Evandro Luiz da Conceição fait partie du premier groupe d’élèves quotistes de l’école de communication de l’université fédérale de Rio de Janeiro (UFRJ). Pour sa recherche de maîtrise, il veut apporter des narratives autrefois marginalisées au coeur de l’université : il étudie le débat sur la légalisation de la marijuana dans les musiques du chanteur de samba Bezerra da Silva et du rappeur Marcelo D2, en analysant comment ils font tous deux le portrait, à deux époques différentes, de l’inégalité et de la violence au Brésil.

Evandro Lima, auteur de Je suis encore favela

Tout comme Luana, Evandro note la disproportion entre les sources bibliographiques écrites par des auteurs noirs et blancs.

J’ai remarqué que la majeure partie des théoriciens que j’ai cité dans mon mémoire étaient blancs. Pour ma maîtrise, j’ai cherché à rompre cette systématique. Quand nous pensons à la construction intellectuelle, nous avons tendance à penser à ce qui est dans le contexte érudit, mais il existe une analyse très riche sur la réalité brésilienne dans ces deux auteurs.

Evandro raconte que sa mère, aujourd’hui décédée, avait dû abandonner ses études alors qu’elle était encore en primaire pour travailler comme nourrice et employée domestique. Pour sa famille, l’entrée d’Evandro à l’université (possible uniquement grâce aux quotas) représenta plus qu’un orgueil fraternel.

J’ai inauguré une nouvelle phase pour ma famille, j’ai acquis une autre place dans la société. Quand j’étais petit, je disais que je voulais être journaliste, et on me disait qu’il fallait que j’arrête de rêver, que les fils de pauvres n’allaient pas à l’université. Aujourd’hui, je pense déjà à mon doctorat…

L’intégralité de l’article d’Helena Borges en VO ici.

Pour en savoir plus sur les quotas : Je suis encore favela est composé d’une vingtaine de nouvelles, mais aussi de deux grands articles, pour approfondir un sujet. C’est ce qui en fait un livre presque sociologique ! Le premier article est consacré aux évangéliques, le deuxième aux quotas raciaux et sociaux. Lisez une partie de notre article en cliquant ici.

[Les éditions Anacaona sont heureuses de participer à leur façon à l’éclosion de cette nouvelle génération d’intellectuels noirs ou issus des quartiers défavorisés. Pour découvrir en partie leurs textes de fiction, retrouvez-les dans Je suis encore favela.] 

Retrouvez ces auteurs et de nombreux autres

Paula

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