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Le téléphérique du Complexe de l’Alemão ne transporte plus personne

Le Complexe de l’Alemão, un ensemble de treize favelas réparties sur 300 hectares et comptant environ 150 000 habitants, est connu comme l’une des favelas les plus pauvres de Rio de Janeiro. Dans le contexte de la préparation de la Coupe du Monde de 2014, l’Etat fédéral du Brésil et l’Etat de Rio ont décidé de conduire une politique d’intégration de ces quartiers au reste de la ville.

Pour tisser un lien entre les favelas, ses nouveaux services et le reste de la ville, une impressionnante télécabine 10 places disposant de six gares a vu le jour : le « Teleférico do Complexo do Alemão », présenté à l’époque de son inauguration, en juillet 2011, comme un outil de développement social. Pourtant ce téléphérique ne transporte plus personne depuis 6 mois.

Ce système de transport digne d’une station de ski, qui assurait une liaison directe avec la ligne de trains urbains de Rio, a eu le mérite de désenclaver le Complexe d’Alemão, un ancien bastion des narcotrafiquants au nord de Rio.

La ligne de 3,5 kilomètres est vite devenue une des principales destinations touristiques de Rio et a vite été adoptée par les habitants du bidonville, qui évitaient ainsi les rues sinueuses du quartier. Chaque jour, environ 9.000 passagers utilisaient le téléphérique.

D’un budget de 210 millions de réais (quelque 64 millions de dollars au cours actuel), c’est la société grenobloise Pomagalski qui a mené à bien les travaux sur le modèle du téléphérique construit à Medellin (Colombie). Pourtant, à l’arrêt depuis six mois, les autorités de Rio de Janeiro déclarent le manque de moyens pour l’entretenir. D’importants travaux de maintenance étaient nécessaires alors que la mairie n’a pas les moyens financiers pour subventionner cela.

La ligne a été fermée en septembre, quelques semaines après la fin des jeux Olympiques de Rio-2016, et illustre un exemple de l’échec des politiques publiques de la métropole brésilienne. Les JO de 2016 ont été un gouffre financier et la mairie ne parvient plus à entretenir ses infrastructures. Si le téléphérique ferme définitivement, ce sont 150 personnes qui perdront leur emploi et 10 000 qui seront pénalisées.

Dans certains quartiers défavorisés, comme Alemão, l’un des plus pauvres de la ville, cette interruption a mis en péril de nombreux projets éducatifs et sociaux, car autour de chaque arrêt du téléphérique on retrouvait des centres sociaux avec bibliothèque, dispensaire médical et atelier de formation professionnelle, etc, où les habitants du quartier allaient pour avoir diverses activités.

Vous pouvez regarder ici une brève vidéo sur le sujet.

Un élément du quotidien : le téléphérique de l’Alemão fait son apparition dans l’anthologie Je suis Rio, où Rio de Janeiro est raconté par ceux qui y vivent, ceux qui la vivent :

Nous entrâmes dans la cabine, je m’assis rapidement et donnai à Régiane mon appareil photo, afin qu’elle puisse photographier ce que la panique m’empêchait de voir. Je fermai les yeux et sentis un froid parcourir ma colonne quand la cabine s’ébranla. Je sentais le balancement… J’étais morte de trouille et priai en silence […] J’avais envie de contempler le paysage que j’imaginais extraordinaire, les morros, mais je gardais les yeux fermés, de peur de me ridiculiser encore plus.

— On y est ?

— Avant-dernière station. Ouvre les yeux, ma cocotte ! J’ai cru que tu t’étais endormie !

Il était temps d’affronter mes démons. Je comptai jusqu’à dix et ouvris les yeux… C’était haut ! Mais que c’était beau… On voyait tous les détails. J’étais tellement heureuse de voir l’Alemão d’en haut… (« J’ai mis a peur de côté pour être heureuse », Yolanda Soares, dans Je suis Rio)

Lisliere Dantas

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