L’enseignement du français au Brésil

Les éditions Anacaona s’attachent à traduire vers le français des oeuvres brésiliennes… et défendent aussi, plus globalement, l’enseignement du français au Brésil et du portugais en France.

Voici un entretien avec Anne Ricordel, attachée pour le français au Consulat général de France à Rio, originellement publié dans Le petit journal. En voici quelques extraits, où elle parle d’éducation publique et d’échanges culturels.

Quels ont été les principaux projets sur lesquels vous avez travaillé ? 
Anne Ricordel : La France a toujours eu une coopération éducative extrêmement ancrée avec les établissements privés qui enseignent le français. A Rio, on retrouve le colégio de São Bento, où le français est obligatoire dès le primaire, il y a également les Jésuites, l’Ecole suisse, ou encore le lycée franco-brésilien. (…) Mais ce n’est pas cela qui va faire grossir le rang de la scolarité en français.

Quels moyens sont-ils envisagés pour développer l’enseignement du français ?
Je suis arrivée en 2010 au moment où étaient publiés les résultats nationaux du classement scolaire des états brésiliens. Celui de Rio était avant-dernier, ce qui était scandaleux pour un état aussi riche et avancé. Sergio Cabral a alors changé de secrétaire d’Etat à l’Education en nommant Wilson Risolia, qui est toujours en poste aujourd’hui. Ce dernier a révolutionné ses fonctions en l’espace de quelques mois. La France est le premier pays étranger avec lequel le secrétariat d’Etat a pris contact et il m’a demandé de réfléchir à des projets qui pourraient aider à sa réforme. Au même moment, le recteur de l’académie de Créteil de l’époque nous a contactés car il souhaitait travailler avec le Brésil depuis longtemps. Nous avons alors proposé à Wilson Risolia une section internationale avec un complément langue étrangère et des cours en langue étrangère. C’est vraiment sur ce projet que j’ai consacré une partie de mon poste à Rio en dehors de ce qui existait déjà. Cela a abouti à la création du lycée bilingue franco-brésilien de Niteroi où les élèves font 10 heures de français et 5 heures de biologie en français par semaine. Par ricochet, d’autres municipalités voisines se sont déclarées intéressées telles que celle de São Gonçalo avec qui nous avons un important projet.

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L’école publique bilingue franco-portugais de Niteroi

L'école

Comment redynamiser le français au Brésil alors qu’il était encore présent dans toutes les écoles il y a quelques dizaines d’années ?

C’est vrai que les personnes qui ont aujourd’hui une cinquantaine d’années faisaient du français à l’école. Notre souhait est de réintroduire le français dans le système scolaire, pas du tout comme cela se faisait avant, mais plutôt avec l’intégration d’une matière en français, soit de la co-diplômation, de la co-certification. C’est une façon de faire rentrer le Brésil dans la cour des systèmes éducatifs visibles parce que ce projet est réciproque. C’est ainsi que la section brésilienne du lycée de Noisy-le-Grand (Seine-Saint-Denis) ouvrira ses portes en septembre. Ce n’est pas de la coopération d’assistance, mais bien bilatérale. L’idée est désormais de multiplier ces expériences.

La place du français dans l’Etat de Rio est-elle plus importante que dans le reste du Brésil ?
Oui, le bloc traditionnellement francophone est à Rio, 50% des élèves brésiliens pratiquant le français sont ici. Il y a une très grande histoire avec la France, la langue et la culture françaises. Le potentiel à Rio est ainsi énorme et il y a une vraie appétence. Les jeunes qui sont entrés sur concours au lycée bilingue de Niteroi, ils en rêvaient, ce qui est un peu inattendu pour des élèves venant principalement de milieux défavorisés. C’est plutôt encourageant.

De nombreux projets restent en chantier …

Notamment un lycée hôtelier en partenariat avec l’académie de Rennes (lycée hôtelier de Dinard) et un lycée bilingue à option audiovisuelle en partenariat avec l’académie de Nantes.

Personnellement, quels souvenirs garderez-vous de Rio ?
La vie en plein air avec toutes ses composantes : pieds nus et manches courtes ! C’est quelque chose qui m’aura beaucoup marqué et on oublie rapidement que ce n’est pas possible ailleurs. C’est le côté agréable de Rio, mais les difficultés de la vie quotidienne pour la majeure partie des personnes qui travaillent dans le secteur éducatif m’ont aussi touché. Tout est un peu compliqué, un peu long, un peu lent. J’aurais au moins pu ajouter à mes cordes une grande qualité qui me manquait : la patience et la capacité à reformuler. Rio m’aura appris cela. Ce qui m’a frappé aussi, c’est la façon dont les Brésiliens peuvent, à un degré plus élevé qu’ailleurs, garder espoir sur un résultat positif. Malgré les retards, les entraves, les échecs, il y a cette grande foi : cela va s’arranger et on aura un résultat, si ce n’est pas tout de suite, ce sera demain, et ainsi de suite. Chaque chose en son temps, à un rythme qui nous échappe, mais que nous devons suivre et auquel nous ne devons surtout pas nous opposer !

L’entrée du lycée français Molière à Rio, dans le quartier de Laranjeiras

 

(Propos recueillis par Corentin CHAUVEL pour Le petit journal.)

Voir également cet article sur l’ouverture de la première école publique bilingue français-portugais à Niteroi.

Alors que la rentrée des classes approche, je précise que plusieurs collèges et lycées à Paris proposent le portugais en section européenne (5 heures par semaine!). Il faut faire une demande de dérogation à l’Académie… mais il y a des places ! J’encourage vivement les enfants à apprendre le portugais…. superbe langue et langue d’avenir. 🙂

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