Féminisme et âgisme

J’adore les réflexions de Joice Berth – révélateur de sa pensée impertinente et pertinente ! Lisez plutôt celle-ci :

Agisme (1/2)

Parlons de l’ÂGISME. Encore une idée reçue, qui laisse à penser que l’âge rend les personnes inutiles, et se manifeste par la terreur de vieillir et le rejet des symboles de la vieillesse, comme les rides et les cheveux blancs par exemple. C’est cela, l’âgisme : le mépris envers ce processus naturel du corps, de la vie. Il existe des crèmes anti-âge /anti-vieillissement. Vous ne trouvez pas cela bizarre ?! Être anti-vieillissement, c’est être contre la vie, car pour vieillir, il faut être vivants… Mais le féminisme aussi est âgiste. Il ne dit rien sur la façon dont ce type de préjugés est bien plus cruel et dirigé vers les femmes, et sert d’instrument pour le machisme. Les hommes peuvent vieillir, se remarier, batifoler, continuer à diriger une entreprise, un pays… Pas les femmes.

La norme est blanche, et jeune. Plus on est jeune, mieux c’est… La valeur de la femme est aussi conditionnée à son âge (pas trop élevé). Plus nous sommes vieilles, plus ils doutent de nos compétences, plus ils régulent notre sexualité et vie amoureuse, plus ils rejettent notre apparence. (…) Les lolitas ont la préférence du patriarcat et les femmes dépensent des fortunes en crèmes, remèdes et chirurgies plastiques qui leur promettent la jeunesse éternelle. Vieillir est digne et les marques du temps devraient être exhibées comme un trophée, surtout pour les femmes noires, comme moi, qui sont les plus touchées par les féminicides. Je vois des personnes qui vénèrent l’ancestralité, mais rejettent ses signes, en traitant les personnes qui vieillissent comme des incapables, des faibles, des gens qui perdent la boule. Et cela ne sert à rien de jouer l’outrée devant des commentaires sur l’apparence d’une femme âgée célèbre – et parallèlement, de continuer à exalter et chercher la jeunesse éternelle… Luttons contre l’âgisme en commençant par nous-mêmes, et en rejetant cette imposition névrotique. Il est temps de perfectionner nos qualités et de nous défaire des futilités du monde.

Joice Berth Instagram

Texte écrit par Joice Berth, féministe brésilienne, publié sur son compte Instagram. Découvrez la pensée de Joice Berth, avec son livre sur l’Empowerment.

Agisme (2/2)

Pourquoi le féminisme doit-il discuter de l’âgisme ? Parce que l’âgisme recoupe les questions de genre et de race. Il suffit de se souvenir de Fatima Bernardes (présentatrice-star du JT, 57 ans) et du trouble qu’avait causé sa relation amoureuse avec un homme « plus jeune ». Les commentaires méchants et machistes, qui insinuaient qu’une femme de son âge ne pouvait pas être suffisamment attractive pour réveiller le désir d’un homme plus jeune. Pourtant, la liste de séducteurs masculins, bien plus âgés que Fatima Bernardes, é trèèèèès longue !

Les femmes plus âgées sont constamment présentées comme celles qui ont perdu la beauté et la fraîcheur de la vie – il suffit de regarder la quantité de crèmes « anti-âge » dirigées vers le public féminin. Vieillir en étant une femme dans une société capitaliste, c’est cesser d’être utile pour la production, l’utilisation. Vieillir, c’est l’aboutissement final des pratiques de domination macho-raciste, où apparaît distinctement la place d’infériorité construite par la société phallo-patriarcale. Pour les hommes, la vieillesse représente l’apogée de leur capacité de domination, la femme plus jeune étant une confirmation de leur virilité « résistante ». Le phallos ne vieillit pas, alors que la sexualité de la femme « s’évapore », une fois qu’elle s’est acquittée de ses obligations de procréation.

Ce n’est pas un hasard si les hommes plus vieux préfèrent les femmes plus jeunes. La jeunesse de la femme est aussi un instrument de domination, dans la mesure où elle est liée à une supposée innocence, une impuissance, et la nécessité de quelqu’un de « plus expérimenté » pour la protéger et lui apprendre la vie. Un vieil homme est un galant, un séducteur. Une vieille femme est une sorcière, ou une Mamie-gâteau qui garde ses petits-enfants. Ou celle qui en sait trop et peut défier les pratiques de domination masculine. La fixation des hommes âgés envers des femmes plus jeunes révèle notre culture patriarcale, où la domination va se recouvrir du vernis d’un supposé amour.

Pour ces raisons, et bien d’autres, le féminisme doit discuter de l’âgisme, car c’est ce qui nous attend lorsque le machisme n’aura apparemment plus rien à soustraire de notre humanité. Je n’ai rien contre la différence d’âge dans les relations amoureuses – mais j’observe juste,dans notre société, qui est autorisé à certaines pratiques, et qui ne l’est pas.

Texte écrit par Joice Berth, féministe brésilienne, publié sur son compte instagram. Découvrez la pensée de Joice Berth, avec son livre sur l’Empowerment et le féminisme.

 

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