Le démantèlement des postes de police pacificatrice dans les favelas de Rio devient inévitable. Depuis 2013 de nombreuses accusations de bavures policières et de corruption dans les UPP ont commencé à miner la crédibilité de ce programme.
En 2008, les autorités brésiliennes mettaient en place les UPP (Unités de Police Pacificatrice) dans les favelas de Rio. Ces Unités pariaient sur une occupation et une reprise du contrôle des territoires auparavant contrôlés par la criminalité dans le but de s’éloigner d’une logique fondée sur la confrontation, l’arrestation des trafiquants, la violence, pour se rappocher du modèle de police de proximité.
Le projet concernait surtout les favelas situées à proximité des quartiers touristiques, dans la perspective du Mondial -2014 et des jeux Olympiques de 2016.
Aujourd’hui, dix ans après l’installation du premier poste de police pacificatrice, les autorités se rendent compte du manque de résultats du projet et décident de fermer la moitié de ces commissariats de quartier.
Au début, les chiffres de la violence ont baissé dans les zones où les postes ont été implantés, mais à partir de 2013 de nombreuses accusations de bavures policières et de corruption dans les UPP ont remis en question la crédibilité de ce programme.
D’après un rapport de la police militaire elle-même, les autorités ont “perdu le contrôle” de la plupart des favelas, ces quartiers populaires où vit près d’un quart des habitants de Rio, la plupart dans des conditions insalubres, leur vie rythmée par les fusillades au quotidien.
Les UPP les plus importantes, et les plus grandes, vont être démantelées, comme celle de la Cité de Dieu, tristement connue pour sa violence et sa criminalité endémique. L’immense favela de Rocinha, située tout près des quartiers chic et des plages touristiques, carrefour du trafic de drogue et théâtre de très violents affrontements ces derniers mois, va également perdre ces policiers de proximité.
C’est le général Braga Neto, en charge de la sécurité publique de Rio, qui a décidé de tailler dans le budget des UPP, contraint, affirme-t-il, par la crise économique qui a épuisé les ressources de la ville. Mais aussi par l’absence de résultat notoire de ces unités de police dans les favelas qu’elles sont censées contrôler. Les UPP avaient été mises en place dans les favelas violentes de Rio avant la Coupe du monde de football et les JO. Des centaines de millions d’euros ont été dépensés.
Cette grave crise économique que traverse l’État de Rio depuis environ un an a entraîné une forte augmentation de la violence. L’année dernière, plus de 6 700 morts violentes ont été recensées dans la ville. Ce chiffre affolant en augmentation constante avait conduit le président Michel Temer à décider l’intervention militaire en février dernier. Pourtant, quelques mois plus tard, l’armée est montrée du doigt pour son absence de progrès… avec, au contraire, des exactions commises par des soldats.
L’observatoire de l’intervention militaire vient de publier son premier rapport, sur la présence de l’armée à la tête des forces de l’ordre de Rio de Janeiro. Le résultat est catastrophique : les experts dénoncent l’absence de programme, de résultat et de gouvernance. De fait, depuis l’arrivée des militaires à Rio, les confrontations, la criminalité et la violence ont augmenté. La réduction du nombre d’unités de police dans les quartiers défavorisés risque d’empirer une situation déjà critique.
Envie d’en savoir plus sur la présence policière dans les favelas ? Lisez l’article publié dans la partie documentaire du recueil de nouvelles Je suis toujours favela (2014) : Les Unités de police pacificatrice : panorama, dilemmes, perspectives.