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Pourquoi j’ai eu envie d’écrire un livre sur Dandara dos Palmares

En novembre 2014, à l’occasion de la Journée de la Conscience Noire, j’ai écrit dans ma rubrique « Questions de genre » de la revue Forum un article intitulé « Connaissez-vous Dandara dos Palmares ? » L’objectif était pour moi de dénoncer et de questionner le machisme et le racisme brésiliens, à cause desquels des héroïnes comme Dandara sont systématiquement oubliées de l’Histoire. Les Brésiliens connaissent en général Zumbi, le chef du quilombo de Palmares, à qui l’on rend hommage le 20 novembre, mais Dandara est toujours oubliée et ignorée.

J’ai passé de nombreuses années à l’école, au lycée, à l’université sans jamais entendre parler de Dandara. La première fois, ce fut lors d’un débat, alors que j’étais déjà adulte. Piquée par la curiosité, j’ai ressenti le besoin de connaître des femmes Noires qui pourraient me servir d’inspiration, et de miroir. En décidant de faire des recherches sur cette guerrière, j’ai vite constaté l’absence et la difficulté d’accès des documents à son sujet. On trouve sur Internet quelques articles qui parlent de Dandara – la plupart du temps sur les sites des mouvements Noirs et/ou féministes – mais les informations sont peu nombreuses.

Un des rares fait avéré sur Dandara est qu’elle a été l’une des cheffes du quilombo de Palmares, qu’elle a été la compagne de Zumbi, et qu’elle n’acceptait pas le rôle féminin imposé par la société de l’époque. Personne ne sait trop où elle est née ni quand elle est morte. La légende affirme que, plutôt que d’être capturée au moment de l’assaut final contre Palmares, Dandara choisit de se jeter du haut d’un rocher, préférant ainsi la mort à l’esclavage. Il existe de réelles controverses quant à l’existence même de Dandara. Certains chercheurs affirment qu’on la confond avec d’autres chefs de quilombos. Après l’article de Forum, de nombreux lecteurs m’écrivirent, sceptiques, m’affirmant que Dandara n’était qu’une légende. En lisant ces commentaires,  je restai pensive – et ennuyée en même temps. Je pensais à l’époque – et je le pense toujours – que si Dandara n’est pas dûment enregistrée dans l’historiographie brésilienne, le machisme et le racisme si présents dans notre culture y sont certainement pour quelque chose.

J’ai alors décidé de confronter cette idée de « légende » comme une provocation – et une opportunité. Je me suis dit : si Dandara est une légende, quelqu’un doit l’écrire ! Et c’est ainsi que j’ai dé-cidé d’écrire un livre de fiction, inspiré d’une partie de l’histoire du Brésil et de ce que l’on sait de cette cheffe de quilombo.

©Aline Valek

Pour écrire Dandara et les esclaves libres, j’ai apporté quelques éléments de fantasy – mon genre littéraire de prédilection – et j’ai cherché à valoriser les religions d’origine africaine, en faisant d’Iansã la créatrice de Dandara. J’ai donc pris la liberté d’inventer cette naissance poétique et mystérieuse, qui peut se justifier par notre absence d’informations sur la naissance de Dandara – puisque personne ne sait avec précision où elle est née et comment elle est arrivée à Palmares. C’était donc l’occasion parfaite pour insérer une narration à caractère légendaire et magique. J’ai choisi Iansã pour être la mère de Dandara car, parmi tous les orixas féminins, c’est elle qui représente le mieux une cheffe de quilombo, comme l’a été Dandara. Sa forte personnalité en faisait la mère parfaite pour Dandara qui, grâce à cette filiation, porterait ainsi avec elle les qualités de sa mère-orixa.

Outre les religions d’origine africaine, j’ai également donné des noms africains aux personnages. Lorsque les Noirs étaient déportés au Brésil, une des violences qui leur était faite était le changement de leurs noms, qui étaient échangés contre des prénoms chrétiens comme José ou Luiza, par exemple. En outre, les esclaves recevaient le nom de famille des maîtres qui étaient leurs « propriétaires ». Mes amis dont la famille est d’origine européenne ont des noms qui ont été préservés : ils savent d’où ils viennent, quelles étaient les coutumes de leurs ancêtres, leurs fêtes, leurs traditions. Alors que moi, dont une partie de l’arbre généalogique vient d’Afrique, je n’ai aucune idée de l’origine de mes ancêtres. Je sais seulement qu’ils ont été enlevés du continent africain et déportés ici de façon cruelle, barbare et inhumaine. J’ai donc dû me résigner à ce nom de famille d’origine européenne, mais je passerai ma vie à essayer de revivre mon ancestralité. Par mes histoires et poésies en cordel, et aujourd’hui ce livre, j’essaie de contribuer avec quelques petites pièces à cet immense puzzle qu’est la diaspora Afro. C’est pour cela que j’ai choisi des noms d’origine africaine pleins de sens pour mes personnages.

La Dandara que j’ai imaginée, et que j’aimerais que tout le monde connaisse, est une femme qui brise les idées reçues sur le corps d’une guerrière. Dandara a la peau sombre et les cheveux crépus.  Elle porte une arme spéciale : l’akofena, ce poignard recourbé, qui symbolise le courage et l’héroïsme de la guerrière. J’espère que vous tous, lectrices et lecteurs, aurez ensuite envie de faire des recherches sur l’univers de ce livre : l’akofena, les orixas, les noms africains et bien sûr l’histoire du quilombo de Palmares. J’espère que cette histoire que j’ai écrite vous donnera envie d’en savoir plus sur la population Noire brésilienne – ses origines, ses victoires, ses luttes. Enfin, j’offre ce livre en toute humilité à Dandara dos Palmares et à sa mémoire, qui vit, palpite, pleine d’énergie, en mouvement. Légende ou réalité, son histoire est authentique. Elle nous inspire, nous renforce et ne pourra jamais être éteinte.

Dandara est vivante !

Jarid Arraes. Préface à Dandara et les esclaves libres.

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Paula

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