Les écrivains Ferréz et Patricia Melo au Salon du livre de Francfort/Brésil 2013

Samedi 12 octobre avait lieu à Francfort une des rencontres que j’attendais le plus : Ferréz et Patricia Melo (l’auteure de

Ferrez et Patricia Melo au Salon du livre 2013 de Francfort

Ferrez et Patricia Melo au Salon du livre 2013 de Francfort

Enfer, Le voleur de cadavres, etc.). Un débat qui s’annonçait passionnant, avec deux auteurs qui parlent de violence avec la favela comme toile de fond. Melo est assez controversée dans le milieu des écrivains de la littérature périphérique – “une bourgeoise qui prétend savoir écrire sur les favelados?…” – aussi j’attendais de voir comment deux personnes aussi différentes justifieraient leur travail.

En toute franchise, un peu déçue par Patricia Melo… J’ai pourtant adoré Enfer, et O Matador, que j’ai dévorés. Mais là… je n’ai pas trouvé qu’elle ait vraiment défendu son travail. C’était un peu du papo furado, du blabla, assez abstrait et théorique, et au bout du compte, aucune phrase n’est vraiment ressortie, aucune grande idée… Pas d’envergure, j’ai trouvé… 🙁

En revanche, sincèrement, Ferrez a été à la hauteur : engagé, intègre.. et cool.

Bref compte-rendu avec ces morceaux choisis :

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Salle pleine pour écouter Ferrez et Patricia Melo

“J’ai voulu écrire un livre sur l’angoisse [son dernier livre, Deus foi almoçar, parle d’un type de classe moyenne en pleine dépression, en pleine crise d’angoisse. Pas de favelas, de violence, de drogues et d’argot]. J’ai laissé de côté mon angoisse sociale, celle qui me prend à la gorge devant les injustices.Car l’angoisse dépend de la classe sociale – mais l’angoisse de l’âme concerne tout le monde. Aujourd’hui je vois les gens qui vont travailler… je me demande pourquoi? Qu’est-ce qu’ils construisent? Ils veulent juste prouver à l’autre ce qu’ils font – et pas ce qu’ils sont à eux mêmes.”

“On assiste à un phénomène d’ascension économico-sociale, c’est vrai. La Classe C veut être Classe B, la classe B veut être classe A, la classe A … veut rester maître du monde 🙂 Mais au total, tout le monde fuit de sa condition pour essayer d’être quelqu’un qu’il n’est pas.

Et sur son travail :

“Parfois, je me prends pour un évangélique 🙂 Je parle à ceux qui ont besoin de la parole. Je veux sauver les gens avec les livres. Mon objectif, quand j’écris, c’est de former des lecteurs. (…) Je me sens comme un multiplicateur, je fais un travail de multiplication, j’ai le sentiment que je travaille à l’amélioration du pays.

[quote]Ca m’énerve quand on me dit que je parle des minorités dans mes livres. Je ne parle pas des minorités, mais de la majorité. Dans mon quartier à Capão Redondo, il y a plus de 300 000 habitants. A Vila Mariana, le quartier bohême de São Paulo, il y en a 50 000. Au total, la périphérie, ce sont 60% des habitants de São Paulo. Je parle de ceux qui font tourner la ville : ceux qui font la cuisine, la sécurité, le transport – alors qu’ils n’ont pas tout cela chez eux.[/quote]

“Depuis 7 ans, je gère une ONG qui s’appelle Interferência et qui opère à Capão. Tout a commencé avec le projet de monter une bibliothèque : on a acheté une petite maison et on a commencé à donner des cours. Nous sommes ouverts de 09h à 16h30, cela évite que les enfants restent dans la rue avant ou après les cours [au Brésil, les cours ont lieu soit le matin, soit l’après-midi]. C’est une façon de donner en retour à tous ceux qui m’ont donné. Parce que je n’ai pas eu ça quand j’étais petit, que je n’avais personne pour discuter d’autre chose que de nanas, et que je ne veux pas ça pour mes enfants.

“J’ai écrit plusieurs livres jeunesse. Avec quel enfant je dialogue? L’enfant qui vit à côté de moi. Je ne me reconnais pas dans la plupart des livres pour enfants, car ils vivent toujours une réalité trop belle. Je trouvais important de parler aux enfants de l’alcoolisme, de la mort, de la drogue, car ce sont malheureusement des situations qu’ils vivent aussi.

Sur le discours évènement de Ruffato (voir article ici) :

“J’adorerais que les écrivains brésiliens que je rencontre ici gardent leur franc-parler. Je les vois ici, en Allemagne, tout en indignation – alors qu’au Brésil ils se tiennent tranquilles et j’ai souvent l’impression d’être tout seul à dire ce que je pense. Ou bien peut-être que c’est chic d’être indigné en Allemagne?

Voir la page d’Anacaona sur Ferrez

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